Camera dei Deputati Senato della Repubblica Home Back
  Italian
Français







 Rapport du Président du Sénat italien, M. Nicola Mancino

Messieurs les Présidents, Chers Collègues,

Le processus d'intégration européenne connaît une phase cruciale. La Convention chargée de rédiger le projet de Charte des droits est sur le point d'achever ses travaux et s'apprête à livrer au Conseil européen de Biarritz le fruit de son travail. D'ici quelques mois, se tiendra à Nice un Conseil européen au cours duquel devront être abordées plusieurs questions qui sont fondamentales pour la configuration de l'architecture de l'Union après Amsterdam.
La Conférence d'aujourd'hui prend donc une importance tout-à-fait particulière , non seulement en raison du haut niveau institutionnel de ses participants, mais également en raison du moment où elle a lieu, car à mon sens il faut saisir cette opportunité pour favoriser une participation plus adéquate des organes représentatifs de la population de l'Union.

 1. Les développements du débat des Parlements sur les réformes institutionnelles après Amsterdam.

Le besoin de parvenir à d'autres réformes avait déjà été reconnu dès la conclusion du Traité d'Amsterdam, en juillet 1997, auquel on trouve en effet, joint en annexe, un protocole qui prévoit, dans la perspective de l'élargissement de l'Union, une nouvelle série de négotiations concernant les questions restées sans solution de la Conférence intergouvernementale (CIG) précédente : la révision de la composition de la Commission et la nouvelle pondération du vote au Conseil. Une déclaration signée par la Belgique, la France et l'Italie soulignant l'exigence de procéder également à une extension significative du recours au vote à la majorité qualifiée figure aussi jointe en annexe.

1.1 Les questions de l'efficacité de l'action de l'Union dans la perspective de l'élargissement et du déficit démocratique.

Conscients de l'importance de régler les questions laissées sans solution par Amsterdam, en vue d'éviter le risque d'une paralysie de l'Union élargie, les Parlements nationaux et le Parlement européen ont développé et intensifié les occasions de débat et d'échange de vues, conscients que la question de la légitimité dèmocratique des institutions de l'Union et de leur rapprochement des citoyens se conjugue étroitement avec celle de la mise en valeur du rôle des Assemblées parlementaires, européenne et nationales, dans la révision des normes fondamentales et des processus de décision communautaires(1) .

Une reconnaissance indirecte du besoin d'accroître la légitimité et la représentativité du cadre institutionnel communautaire vient, par ailleurs, de la décision de joindre en annexe au Traité d'Amsterdam, sur la base de l'impulsion déterminante des Conférences des organes spécialisés dans les affaires communautaires (COSAC) de Rome et de Dublin de 1996, un protocole expressément consacré au rôle des Parlements nationaux. On a ainsi inséré dans les traités la reconnaissance de la COSAC et on a formellement sanctionné le droit des Parlements nationaux d'être informé des actes préparatoires de la législation communautaire(2) .

1.2 La Conférence des Présidents de Vienne

Le thème des réformes institutionnelles a ainsi été abordé dans diverses enceintes interparlementaires, telles que les COSAC elles-mêmes, dans des tables rondes organisées par le Parlement européen et dans des rencontres informelles des Présidents des Commissions des affaires étrangères et des affaires européennes. La Conférence des Présidents des Parlements s'est elle aussi arrêtée sur ce sujet en d'occasions précédentes et, en dernier, dans la Conférence informelle de Vienne, du 1er décembre 1998, centrée sur le rapport du Président Langendries(3) .

Le Président Langendries mettait en exergue le lien qu'il y a entre le renforcement de la légitimité démocratique, dans le cadre institutionnel de l'Union européenne, et le développement et la rationalisation de la coopération entre les Parlements. Il établissait en outre une distinction entre ce qu'il est convenu d'appeler la légitimité institutionnelle et des procédures, d'une part, et ce qu'il est convenu d'appeler la légitimité substantielle, d'autre part. La première distinction peut être ramenée aux exigences de compléter les réformes laissées inachevées par le Traité d'Amsterdam(4) , d'améliorer le fonctionnement des institutions européennes et de déterminer un nouveau modèle parlementaire pour l'Union européenne, basé sur le rôle complémentaire du Parlement européen et des Parlements nationaux. La deuxième peut être référée à la capacité des institutions européennes de répondre aux besoins concrets des citoyens sur des thèmes tels que l'environnement, l'emploi et les politiques sociales.

1.3 Le débat sur l'avenir de l'Europe et le rôle des Parlements

Depuis la Conférence de Vienne, le débat sur ces sujets est plus mûr et on est plus conscient que l'approche traditionnelle des négotiations intergouvernementales sur les réformes isntitutionnelles connaît des limites. On a constaté en effet une attention accrue pour le rôle des Parlements: ceux-ci ne sont plus appelés à une implication tardive au moment de la ratification des choix opérés au stade des négotiations, mais ils participent à tout le processus de réforme. Ils donnent à ce processus leur apport et leur contribution actifs, comme c'est le cas au sein de l'organisme préposé à l'élaboration du projet de Charte des droits fondamentaux, significativement dénommé Convention. Les travaux de cet organisme voient, à côté des 16 représentants des Gouvernements et de la Commission, la participation active de pas moins de 46 parlementaires européens et nationaux, auxquels vont notre appréciation et notre gratitude pour le travail qu'ils ont fait.

Au cours des derniers mois, dans le sillage des importantes propositions lancées par divers hommes d'Etat européens(5) , plusieurs modèles de réorganisation de l'Union ont été envisagés. La discussion, qui bien évidemment ne s'est pas limitée au type de contrôle parlementaire à réaliser, témoigne sans aucun doute du besoin de récupérer le lien entre l'efficacité de l'action du Gouvernement aux différents niveaux et la représentativité des institutions appelées à prendre les décisions. C'est une matière sur laquelle le Président de la Commission européenne, M.Prodi, a opportunément lancé une étude.

1.4 Le mandat de la Conférence intergouvernementale défini par le Conseil européen de Cologne

Le Conseil européen de Cologne de juin de l'année dernière a décidé que le mandat de la nouvelle Conférence intergouvernementale serait défini lors du sommet suivant d'Helsinki, en vue du démarrage de la CIG pendant la présidence portugaise, dans le premier semestre de l'an 2000. Au Conseil européen d'Helsinki, des 10-11 décembre 1999, l'échange de vues a eu lieu entre les pays qui - en vue aussi de garantir(6) le respect du calendrier du processus d'élargissement - entendaient circonscrire la nouvelle Conférence intergouvernementale aux trois thèmes que le Traité d'Amsterdam renvoyait à des négotiations à venir (composition de la Commission, pondération du vote du Conseil et extension du vote à la majorité), et d'autres pays(7) qui estimaient nécessaire, au contraire, de saisir l'occasion offerte par la nouvelle Conférence intergouvernementale pour effectuer un plus vaste tour d'horizon des réformes capables de donner plus d'efficacité au cadre institutionnel de l'Union et de rapprocher des citoyens le processus de construction européenne .

La question est liée au besoin de développer, en amont de la technologie institutionnelle, un dialogue sur les buts communs. En d'autres termes, il s'agit de clarifier si, dans les choix du monde contemporain, le principe démocratique ne peut être protégé qu'au niveau des Etats nationaux(8) . Il faut en effet tenir compte de la nécessité de réglementer, y compris au plan supranational, certains phénomènes, liés au processus de globablisation, qui traversent nos frontières. Il faut en effet garantir le respect des principes de la concurrence, la protection des consommateurs, l'adoption de mesures de sécurité sociale des travailleurs, la sécurité dans les transactions télématiques, la protection des données et la protection de la confidentialité. Mais il faut aussi coordonner les efforts pour réaliser une lutte efficace contre la criminalité internationale, y compris la criminalité électronique, pour faire face aux urgences environnementales transnationales, pour gérer de façon appropriée les situations de crise et les interventions humanitaires.

Comme le soulignent à juste titre tous les hommes d'Etat intervenus au débat sur la construction européenne, personne, par ailleurs, ne conçoit plus l'intégration européenne au détriment des identités nationales. Celles-ci, avec leur particularités, doivent constituer plutôt un facteur culturel et institutionnel d'enrichissement de l'identité européenne commune. Il faudra rechercher à ce propos un modèle institutionnel, qui, dans le respect du principe de subsidiarité, permette d'exercer la souveraineté à divers niveaux et utiliser à cet effet, pour chacun de ces niveaux, l'instrument le plus efficace. L'exemple offert à d'autres régions du monde plus ou moins meurtries par des conflits engendrés par la coexistence de différentes identités ethniques, culturelles, nationales ou religieuses se trouverait ainsi également renforcé

1.5 La question de l'extension de l'ordre du jour de la Conférence intergouvernementale.

Le Conseil européen d'Helsinki, par rapport à la définition du mandat de la CIG, n'a atteint un accord que sur les trois thèmes susmentionnés qui constituent les left overs, mais il n'a cependant pas exclu la possibilité d'examiner " les autres modifications du Traité ". Il a été donc attribué à la présidence portugaise la mission d'évaluer la possibilité de compléter l'ordre du jour de la nouvelle Conférence intergouvernementale, qui s'est ouverte le 14 février dernier à Bruxelles et qui devrait s'achever, pendant le semestre de la présidence française, par le Conseil européen de Nice de fin d'année.

Au Conseil européen de Feira, la Présidence portugaise a présenté un rapport par lequel elle a fait constater le consensus manifesté sur l'inclusion à l'ordre du jour de la CIG, en plus des left overs, de la révision des mécanismes liés à la " coopération renforcée "(9) . Elle n'a pas toutefois manqué de souligner les difficultés qu'il y a à élargir la Conférence intergouvernementale à d'autres thèmes.

Divers pays, dont l'Italie, avaient par contre proposé de discuter aussi d'autres aspects, tels que le développement des dispositions sur la politique européenne de sécurité et de défense, la PESD (pour permettre également l'absorption définitive de l'UEO dans le cadre institutionnel de l'Union européenne), l'intégration de la Charte des droits fondamentaux dans les traités et la réorganisation desdits traités.

Le Conseil européen, judicieusement, n'a formalisé aucune décision qui puisse exclure diverses solutions possibles au Sommet de Nice de fin d'année. Compte tenu, par ailleurs, de l'opposition de différents pays à ce que soit étendue la liste des matières faisant l'objet de la Conférence intergouvernementale en cours, on a aussi avancé l'idée soit de lancer, aussitôt après le Conseil européen de Nice, une nouvelle Conférence intergouvernementale soit de déterminer de nouvelles procédures pour la révision des traités permettant, dès l'année prochaine, d'entamer une réflexion sur les autres réformes institutionnelles nècessaires.

La Présidence française elle-même, ainsi que nombre d'Etats membres, dont l'Italie et la Belgique, ont cependant souligné leur indisponibilité à conclure l'actuelle Conférence intergouvernementale par un traité insatisfaisant.

En l'état actuel on peut donc estimer que le prochain Conseil européen de Nice devra se pencher sur trois questions laissées sans solution par le Traité d'Amsterdam surtout en vue d'éviter la paralysie de l'Union dans la perspective d'élargissements supplémentaires. A ces thèmes - et à ceux qui sont nécessairement liés, tels que l'adéquation de la composition d'autres organes de l'Union comme le Parlement, la Cour des comptes et la Cour de justice ainsi que Tribunal de première instance(10) - il faudra au moins ajouter celui de la coopération renforcée, sur l'inclusion duquel dans l'agenda on a déjà trouvé un accord à Feira, et surtout, si les conditions sont réunies, il faudra ajouter le thème de la Charte des droits, conséquence du mandat du Conseil européen de Cologne.

2. Prises de position des Parlements sur ce qu'on appelle les left overs, questions institutionnelles laissées ouvertes par le Traité d'Amsterdam.

De toute évidence le rôle des Parlements nationaux s'exprime d'abord par leur capacité d'orientation vis-à-vis de leurs Gouvernements respectifs sur les sujets qui font l'objet des pourparlers. En effet la contribution que les divers Parlements peuvent donner tant en termes de propositions que pour renforcer le caractère démocratique des procédures visant à solutionner les problèmes institutionnels encore ouverts prend, , en raison aussi des reflets sur l'opinion publique, de plus en plus d'importance.

Des trois thèmes déjà indiqués par le Traité d'Amsterdam, celui qui est politiquement le plus controversé, au vu aussi des contributions venues des Parlements, s'avère être l'extension du vote à la majorité qualifiée dans le cadre de la procédure de décision du Conseil.

A ce sujet, comme cela a aussi été utilement exposé à la COSAC de Lisbonne de mai dernier, le débat développé au sein des différents Parlements a fait apparaître comme majoritaire la volonté de considérer la prise de décisions à la majorité qualifiée comme la règle générale.

C'est à cette position que se rallient, par exemple, les Parlements belge, italien, luxembourgeois, le Bundestag allemand et le Parlement européen. Les désaccords portent plutôt sur les dérogations spécifiques à ce principe, même s'il n'y a pas de divisions sur le maintien de l'unanimité pour les décisions de nature constitutionnelle, qui ont trait à des questions fondamentales pour l'Union ou qui entraînent de toute façon la ratification des Parlements nationaux (11).

La solution de ce point apparaît en tout cas essentielle pour préserver l'efficacité des processus de décision de l'Union et empêcher leur paralysie lorsque celle-ci sera composée de quelque trente Etats membres.

Lié à la question de l'extension du vote à la majorité qualifiée(12) , il y a le thème moins controversé de la nouvelle pondération des voix au sein du Conseil. A ce sujet, l'objectif est d'assurer que les décisions prises à la majorité reflètent non seulement la majorité des Etats membres mais également la majorité de la population de l'Union. Comme le respect de ce principe ne serait pas garanti si, après l'élargissement, on laissait toujours inchangé le critère actuel de pondération, une série d'alternatives se dessinent que l'on peut ramener essentiellement à deux hypothèses. La première envisagerait l'application d'un système(13) , fondé sur une double majorité, des pays e de la population, sans procéder à aucune nouvelle pondération. Cette hypothèse voit surtout l'opposition des pays qui redoutent que la procédure de décision du Conseil ne se complique excessivement et l'hostilité des pays qui, dans la perspective de la redéfinition de la composition de l'exécutif communautaire, seraient obligés de renoncer à un commissaire. Pour ces pays la solution préférable est celle de la révision pure et simple des critères de pondération, en augmentant le poids du vote exprimé par les pays démographiquement plus importants.

Concernant la question de la composition de la Commission, le souci principal porte sur le besoin de sauvegarder le caractère fonctionnel de cet organisme dans une Union élargie à environ trente Etats membres. A ce propos certains soulignent la nécessité que chaque pays dispose d'un Commissaire européen (14) ; d'autres, dont l'Italie, préféreraient fixer le nombre des commissaires indépendemment de celui des Etats membres (15). Tout en préservant un commissaire pour chaque pays, il a été envisagé toutefois d'organiser la Commission de façon différente, soit en dégageant d'elle une sorte de Cabinet composé par le Président et par les Vice-Présidents (16) , soit en instituant la figure des Commissaires sans portefeuille mais ayant des missions spéciales qui leur seraient attribuées par le Président (17).

3. Le débat sur la coopération renforcée

C'est dans le contexte de la discussion sur la définition de l'ordre du jour que s'est concentrée la discussion sur l'importance de la coopération renforcée, que certains préfèrent appeler intégration renforcée. Il s'agit là d'un instrument qui pourrait constituer un pont entre le futur Traité de Nice et les étapes ultérieures. Un assouplissement des règles prévues par le Traité d'Amsterdam pour lancer des initiatives de coopération renforcée pourrait en effet permettre à quelques Etats membres d'avancer dans l'intégration dans des domaines - tels que la politique économique, la coopération judiciaire et de police ou la politique de sécurité et de défense - où il ne serait pas possible pour le moment d'atteindre l'unanimité.

Ces pays d'avant-garde ou " pionniers ", comme certains les ont appelés, préfigureraient des ordres institutionnels dont l'Union européenne dans son ensemble devrait tenir compte. Il faut souligner à ce sujet l'utilité des exemples qu'offrent les dispositions sur la monnaie unique et sur l'incorporation des accords de Schengen dans l'Union européenne, qui ne s'appliquent pas à tous les Etats membres..

Déjà prévu par le Traité d'Amsterdam mais encore inappliqué, ce mécanisme, selon les prises de position de différents Parlements dont ceux d'Italie, de France et du Luxembourg, aurait besoin, pour fonctionner efficacement, de modifications spécifiques : l'abolition du pouvoir de véto des pays qui n'y prennent pas part dès le début ; son extension à la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) ; la réduction du nombre minimum de pays nécessaires pour le déclancher.

A défaut d'une entente sur la simplification des procédures déjà mentionnées, certains redoutent le risque que les coopérations renforcées puissent naître en dehors des traités. A ce propos l'expérience nous montre (18) les difficultés qu'il y a à ramener dans un cadre communautaire les ententes qui seraient nées en dehors de celui-ci et les obstacles plus grands que l'adhésion à ces accords pose aux pays qui auraient décidé de se tenir initialement à l'écart.

L'introduction de normes plus souples sur la coopération renforcée dans le cadre des traités garantirait au contraire le caractère inclusif et ouvert de ces expériences, l'adhésion rapide des pays qui auraient initialement exercé l'opting out et le respect de la cohérence avec les intérêts généraux de l'Union. Comme cela a été noté dans les prises de position de plusieurs Parlements, cette cohérence devrait être préservée, en garantissant un cadre institutionnel unique et en évitant de créer de nouvelles structures et des secrétariats ad hoc. Par contre, il faut à cet effet rendre plus souples les institutions communautaires actuelles (Parlement, Cour et Commission) et sauvegarder, en particulier, le rôle de la Commission en tant que garant du respect des traités (19).

Le parcours que l'on vient de dessiner n'est pas lui non plus à l'abri des préoccupations et il peut bien être utile à cet effet de procéder à une confrontation de points de vue dans toutes les enceintes opportunes entre les représentants des Parlements. En effet il ne serait pas prudent de contourner le débat sur les aspects problématiques qui nécessitent, au contraire, une clarification adéquate. Au nombre de ceux-ci figure, en premier lieu, le besoin d'éviter que la coopération renforcée ainsi dénommee finisse par justifier un renvoi du problème plus important de l'extension du vote à la majorité qualifiée dans les procédures ordinaires. Il faut en outre exclure la moindre configuration qui verrait un paysage avec des Etats membres de première catégorie et des pays de deuxième catégorie (c'est-à-dire ceux qui ne participent pas à ces accords). Il faudrait donc garantir non seulement le caractère ouvert des " intégrations renforcées " mais assurer également la possibilité d'une participation pleine et immédiate des pays de nouvelle adhésion (20).

C'est sur la crédibilité des solutions décelées pour cette question que se joue sans doute l'un des principaux facteurs de succès de la Conférence intergouvernementale en cours.

4. La Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne

Parmi les questions débattues au sujet de l'agenda de la Conférence intergouvernementale figure celle de l'inclusion ou de l'exclusion de la Charte des droits fondamentaux.

Au Conseil européen de Cologne du 4 juin de l'année dernière, les Chefs d'Etat et de Gouvernement ont jugé que les conditions étaient réunies - " en l'état actuel du développement de l'Union " - pour arriver à la formulation d'une Charte des droits fondamentaux.

Organe chargé de l'élaboration du projet de Charte, la Convention a préparé, le 13 septembre dernier, la version la plus actualisée du dispositif qui fera l'objet de remarques générales supplémentaires et d'un examen final pour le mois d'octobre, de façon à ce que le texte définitif du projet puisse être présenté d'abord au Conseil européen de Biarritz et, ensuite, à celui de Nice de décembre de cette année. Le Conseil européen, comme on lit dans les conclusions de Cologne, " proposera au Parlement européen et à la Commission de proclamer solennellement, avec le Conseil, une Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne sur la base dudit projet. Ensuite il examinera si et comment la Charte pourrait être intégrée dans les traités ".

4.1. Le projet de dispositif

Vu l'état des travaux auquel la Convention est parvenue, nous sommes en état de procéder à un échange de vues sur les contenus, quoique non définitifs, du projet de dispositif.

Ce projet affirme que, organisée sur la base du principe de démocratie et de l'Etat de droit, l'Union de peuples européens se fonde sur les valeurs communes constituées par les principes universels et indivisibles de la dignité de la personne, de liberté, d'égalité et de solidarité.

En relation avec chacun de ces principes sont reconnus à chaque individu, et dans des conditions d'égalité, des droits fondamentaux spécifiques qui résultent des traditions constitutionnelles communes aux Etats membres, du traité de l'Union européenne et des traités communautaires, de la Convention européenne pour la sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDU), des Chartes sociales adoptées par la Communauté et par le Conseil de l'Europe et de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes et de la Cour européenne des droits de l'homme.

Le principe d'égalité-universalité des droits fondamentaux appliqué dans la Charte n'est pas sapé par la réserve, limitée, de quelques droits politiques (électorat et éligibilité, protection diplomatique et consulaire) qui est faite aux citoyens européens. Par ailleurs, la Cour européenne de Strasbourg a jugé légitime cette réserve, si elle est motivée par des " raisons très importantes " et parmi ces raisons très importantes on peut inclure la construction politique et institutionnelle de l'Union.

Par des dispositions sûrement novatrices, sont étendus à des citoyens de pays tiers, bien que sous certaiens conditions, la possibilité de la libre circulation, le droit de présenter une pétition au Parlement européen et de s'adresser au Médiateur, le droit d'accéder aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission, le droit à une bonne administration de la part des institutions et des organes de l'Union, incluant l'indemnisation des dommages causés par ces derniers.

Un large débat a eu lieu sur le problème de l'indivisibilité des droits civils, politiques et économico-sociaux. Ne partageant pas ce principe, certains ont proposé la disjonction des droits économico-sociaux, en soulignant leur nature qui ne serait pas celle de droits coercitifs, juridiquement et directement exigibles, mais d'objectifs programmatiques, de prestations confiées à des mesures de politiques sociales prévues à cet effet, que les législateurs sont appelés à adopter, aux niveaux communautaire et national, compte tenu des conditions économiques et des ressources disponibles.

Compte tenu du large débat politique, jurisprudentiel et doctrinal qui a eu lieu par le passé dans quelques Etats membres, la décision d'inclure cette catégorie aussi de droits(21) dans la Charte, indépendemment de qualifications formelles de leur nature, semble prévaloir.

Le résultat atteint semble réaliser un juste équilibre entre deux valeurs communes fondamentales de l'Union : le principe de la libertée de l'individu vis-à-vis d'ingérences et de contraintes de l'autorité publique (la libertée négative) et le principe de solidarité, qui demande un comportement actif des Etats et de l'Union, compatible avec leurs systèmes économiques et socio-normatifs respectifs, en fonction de l'objectif de réaliser des conditions de vie satisfaisantes pour tous.

Le mandat du Conseil européen de Cologne de cataloguer les droits en vigueur dans le système communautaire a été à juste titre interprété par la Convention dans le sens de ne pas se limiter aux droits fondamentaux classiques (22) mais de dégager également les " droits de nouvelle génération ", liés aux progrès réalisés au cours de ces dernières décennies dans la société par la recherche scientifique et les innovations technologiques.

Ces " nouveaux droits " comprennent le droit à la protection et à la préservtion de l'environnement, lié au respect du principe du développement durable (art.36) ; le droit à la protection de la santé, de la sécurité et des intérêts des consommateurs (art.37), ainsi que le droit à l'autodétermination dans le domaine de la bioéthique (art.3) et du traitement des données personnelles (art.8), dans un contexte de compatibilité entre les intérêts généraux et la protection des personnes (23).

A la base des proclamations de la Charte des droits réside une inspiration commune : celle d'assurer à tout homme le droit à la vie, à une vie libre et digne, et dans laquelle la personnalité de chacun puisse convenablement se développer et s'exprimer. L'affirmation et la diffusion de la culture de la vie, qui se fonde sur le principe de l'inviolabilité de la dignité humaine, implique que la vie de chaque personne, dans tous les moments de son existence et quelles que soient ses conditions, est une valeur fondamentale et peut se développer, dans la mesure du possible, dans des conditions égales à celles de tous les autres êtres humains. Ce n'est pas un hasard si le premier des droits fondamentaux universellement reconnu par tous les Etats à tout être appartenant à l'espèce humaine est le droit à la vie, même si des différences sensibles peuvent subsister quant au niveau de protection qu'assurent les divers systèmes nationaux. Il s'ensuit que " personne ne peut être condamné à la peine de mort ou exécuté " (art.2).

1. La question de la valeur juridique de la Charte et de la protection des droits qui y sont reconnus.

A ce moment le problème se pose de la valeur qui devra être attribuée à la Charte et de la protection que pourront recevoir les principes qui y sont proclamés.

La solution de ce problème dépend essentiellement de la question de savoir si et comment la Charte sera intégrée, d'autant que le Conseil de Cologne lui-même, tout en envisageant cette intégration, renvoie la réponse à cette question à des décisions ultérieures. Ce renvoi est dû au fait que certains estiment que le niveau nécessaire d'harmonisation politique et institutionnelle de l'Union n'est pas encore atteint et que les niveaux de protection des droits dans les divers systèmes nationaux n'apparaissent pas homogènes.

Les deux thèses extrêmes sont représentées par ceux qui voudraient faire de la Charte une proclamation politique solennelle, sans une dimension spécifique de coercition juridique, et par ceux qui estiment au contraire que l'hypothèse d'insérer la Charte dans les Traités ne devrait pas rencontrer de difficultés car les principes qui y sont affirmés auraient déjà une vigueur propre en droit international et communautaire et, plus généralement, dans les réglementations des Etats membres du fait que ces principes ont fini par faire partie intégrante de la culture juridique européenne qui est commune à ces Etats.

Des hypothèes de solutions intermédiaires ont été également avancées : celle d'en faire un préambule aux Traités, celle d'en faire un protocole annexé, ouvert à l'adhésion des Etats qui estimeraient ce protocole opportun, et celle, institutionnelle-communautaire, d'une codécision du Conseil et du Parlement européen l'insérant dans le droit de l'Union.

Une fois définie la question de la position de la Charte par rapport au système des sources juridiques communautaires, la question de trouver une clause éventuelle à caractère évolutif permettant sa mise à jour pourrait aussi se poser.

Il est évident qu'un catalogue de droits reconnus est utile dans la mesure où il est accompagné d'une obligation généralisée de les mettre en application.

Mais une question délicate surgit à ce propos et elle a été soulignée par tous les Etats candidats à l'adhésion à l'Union : c'est le problème de la coordination entre la Convention européenne des droits de l'homme et la Charte en cours d'élaboration ainsi que le problème de la coordination entre la Cour européenne des droits de l'homme et la Cour de justice des Communautés européennes.

Autrement dit, il y a le souci du risque que sur le même droit diverses juridictions susceptibles d'être saisies aux échelons national, communautaire et européen pourraient donner des interprétations jurisprudentielles divergentes si ce n'est contradictories (ce qui signifie des niveaux de protection différents).

D'où l'hypothèse, que certains ont avancée, de l'adhésion formelle de l'Union à la CEDU et, donc, au mécanisme juridictionnel de la Cour européenne de Strasbourg, à laquelle l'Union même confierait la protection des droits fondamentaux.

Mais deux considérations s'opposent à cette solution : la première c'est qu'une telle solution ne saurait se réaliser sans une modification préalable explicite du Traité ; la deuxième considération c'est que la Convention ne prévoit pas la possibilité que des organisations internationales puissent y adhérer. Ce n'est pas par hasard que l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe a expressément recommandé une modification des dispositions pertinentes de la CEDU permettant à l'Union d'y adhérer.

A la lumière de tout cela la Convention, après avoir abordé la question au début des travaux, l'a mise ensuite de côté à partir de la considération que l'adoption d'une Charte des droits n'empêche pas ni ne rend inutile la Convention européenne des droits de l'homme et que l'adhésion à cette Convention n'empêche pas ni ne rend inutile l'adoption d'une Charte des droits par l'Union européenne. Des clauses spécifiques prévoient en effet qu'aucune disposition de la Charte ne peut être interprétée au sens de limiter ou de porter atteinte aux droits et aux libertés reconnus par la CEDU et par les Conventions internationales auxquelles les Etats membres sont parties contractantes.

Les prises de position pour attribuer une valeur de déclaration à la Charte n'ont pas de toute façon empêché de choisir de donner au texte de celle-ci une approche la rendant prête à devenir juridiquement contraignante(24) .

Les préoccupations des Parlements de certains pays, caractérisés par des régimes de garantie particulièrement avancés et inquiets de ce que la Charte n'augmente subrepticement les compétences de l'Union ou ne porte atteinte aux droits déjà reconnus aux citoyens dans leurs ordres contitutionnels respectifs apparaissent par ailleurs dissipées par les dispositions qui précisent : que la Charte n'introduit pas de nouvelles compétences ou de nouvelles missions pour l'Union ; que les dispositions de la Charte visent essentiellement à protéger les citoyens vis-à-vis des institutions communautaires ; que ses dispositions s'appliquent aux Etats membres pour autant que ces derniers mettent en oeuvre le droit de l'Union (art.50). D'autres clauses prévoient en outre qu'aucune disposition de la Charte ne peut être interprétée comme limitant ou portant atteinte aux droits et aux libertés reconnus par les Constitutions des Etats membres (art. 52).

5. La question de la remise en ordre des traités et le débat sur la Constitution européenne.

Au débat sur le nouveau modèle institutionnel de l'Union européenne on a, parmi les autres aspects, évoqué la question d'une remise en ordre ds traités dans la perspective de fonder l'Union sur un texte de nature constitutionnelle. Ce sujet a été particulièrement rappelé au cours de ses visites dans quelques Etats européens par le Président de la République italienne, M. Ciampi. Ce dernier, dans un communiqué diffusé conjointement avec le Président de la République fédérale d'Allemagne, M.Rau(25) , a souligné que le débat sur la Constitution européenne ne devra plsu être mené dans la perspective du " si ", mais plutôt dans celle du " quand " et du " comment ".

Les deux Présidents ont souligné qu'il y a une grande attente vis-à-vis de la Charte des droits fondamentaux : en tant qu'élément fondateur de la Constitution européenne, elle serait un repère essentiel pour les gouvernements et les institutions, d'une part, et un instrument de protection et de garantie pour les citoyens, d'autre part. Il serait par-là même prouvé que la source ultime de légitimité des institutions de l'Union réside dans les citoyens et qu'il ne peut pas être d'identité européennen sans une adhésion pleine aux valeurs fondamentales de démocratie et de liberté (26).

Je suis certain que les pays candidats à l'adhésion partagent eux aussi ces valeurs et que l'élargissement pourra renforcer davantage le passage en cours d'une Europe du marché à l'Europe des droits (27)

Quels que soient les parcours appropriés pour atteindre ces objectifs de fond, on ne saurait ne pas tenir compte qu'il y a désormais une reconnaissance universelle de la fonction importante de la Charte des droits pour un rapprochement des citoyens de la contruction institutionnelle de l'Europe.

6. Evaluations finales sur le rôle des Parlements

Une première conclusion que l'on peut dégager des évaluations exposées est la nécessité que, sur les thèmes en discussion, on trouve un dénominateur commun entre les divers Parlements et que ce dénominateur commun forme la base pour un autre rapprochement progressif des positions car, à titre d'hypothèse, si un seul Parlement refusait de ratifier le nouveau Traité, cela pourrait marquer l'ouverture d'une crise européenne (28) . La négotiation en cours a trait à des questions qui ne sont pas sans toucher à la responsabilité aussi des Parlements. En vertu précisément de la structuration qui est la leur et de leur fonction représentative de la société civile tout entière et fort complexe, ces derniers peuvent contribuer à trouver de nouvelles solutions permettant de régler les nombreux problèmes politiques sur lesquels nous nous sommes précédemment arrêtés.

Partie intégrante de ce débat sont la réflexion sur le modèle parlementaire qui devra caractériser le système institutionnel communautaire et la réflexion sur le rôle qui dans la procédure de formation des décisions doit être celui des instances représentantives des peuples européens.

Le déficit démocratique, ainsi dénommé et dont beaucoup se plaignent, consiste aussi dans le fait que, sans associer le Parlement européen, on a transféré à des instances communautaires des décisions qui précédemment relevaient de la compétence des Parlements nationaux.

Pour ce qui est du Parlement européen, il convient de rappeler à ce propos les nombreuses prises de position qui soulignent le besoin de renforcer le rôle de ce dernier - en tant qu'Assemblée légitimée directement par le vote des citoyens - et la position par rapport au Conseil, organisme expression des Gouvernements.

Parmi les hypothèses formulées pour combler ce déficit il y a celle de généraliser la procédure de codécision entre le Conseil et le Parlement, en l'appliquant, de toute façon, à tous les cas où est prévu le vote à la majorité qualifiée. Certes, la codécision ne manque pas de poser des problèmes : si certains Parlements ont mis en évidence qu'elle renforce le caractère démocratique du système communautaire, d'autres craignent que, en l'absence d'une hiérarchie précise entre actes législatifs et actes administratifs de l'Union, elle ne complique la procédure de prise de décisions de nature exécutive.

Un rôle accru du Parlement européen a été invoqué à propos aussi de la procédure de révision des traités - la résolution adoptée par les Commissions des affaires étrangères et des affaires européennes de notre Chambre des députés, le 10 février dernier, engage le Gouvernement à ne pas procéder à la ratification du nouveau traité sans l'approbation préalable des conclusions par le Parlement européen -. Ce rôle accru est également invoqué dans la ratification des accords internationaux conclus par l'Union européenne, même si cette perspective ne fait pas l'unanimité(29) .

Enfin on ne saurait passser sous silence que le rapport même entre la Commission et le Parlement européen est susceptible d'évolution, après les progrès déjà réalisés à Amsterdam, où le double vote, sur le Président et sur le collège, a déjà renforcé le rapport de confiance entre l'Exécutif et l'Assemblée représentative des peuples de l'Union.

Sur le plan du rôle des Parlements nationaux on ne peut sous-estimer la nécessité de leur implication dans les processus de décision communautaires, nécessité reconnue également par le protocole précité qui est annexé au Traité d'Amsterdam . Et ce afin précisément de combler ce qu'on appelle le déficit démocratique.

Le Parlement européen lui-même a pris acte, dans sa récente résolution du 15 juin dernier, que, du moins pour certaines matières, telles que, en particulier, la PESC, il convient qu'il y ait une action de concert entre l'Assemblée européenne et les Assemblées nationales et, à titre d'hypothèse, le Parlement européen a envisagé pour l'avenir la création d'un organisme mixte pour la PESC sur le modèle de la COSAC.

Dans le cadre des rapports de coopération et de collaboration entre les divers Parlements, des propositions se sont fait jour qui sont capables d'avoir une incidence sur le rôle des Parlements nationaux dans le cadre institutionnel, sans entraîner de modifications des traités.

L'analyse du système communautaire montre en effet entre les divers acteurs institutionnels de l'Union et des Etats membres l'émergence de relations qui échappent au classement traditionnel des rapports entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif et qui parfois déterminent l'apparition d'un réseau de relations entre les Parlements. Or, même s'il n'est par réglementé par les Traités - je me réfère par exemple à la Conférence même des Présidents des Parlements - ce réseau de relations est en mesure d'avoir indirectement une incidence sur les processus de décision de l'Union.

Ce réseau des rapports est donc formé non seulement par des organismes reconnus par les Traités, tels que la COSAC, mais également par une multiplication d'initiatives, de tables rondes, de conférences multilaterales proposées par le Parlement européen ou par des Parlaments nationaux (30), ainsi que par le croisement de visites bilatérales de délégations des Commissions parlementaires ou bien de législateurs individuels désignés comme rapporteurs dans les organismes auxquels ils appartiennent réspectivement. A l'incidence de contacts directs s'ajoutent, ensuite, les opportunités énormes qu'offrent les technologies modernes, tant pour ce qui est de l'échange de textes, d'observations, de contributions et d'amendements, que pour ce qui concerne la mise sur réseau et donc la transparence de ces documents.

Parmi les propositions concrètes qui se sont fait jour dans ce cadre figure l'initiative lancée par la réunion de Rome des Présidents des Commissions des affaires européennes de novembre 1988, réunion qui a fait suite à des initiatives analogues des Parlements belge et français. Elle prévoyait, par exemple, de renforcer la position des Parlements nationaux dans la procédure de décision de l'Union par une vérification plus concrète de l'application correcte du principe de subsidiarité. Cette proposition prévoyait une possibilité de vérification ex ante, à travers l'examen du programme législatif de la Commission européenne au cours de la première réunion utile de la COSAC, et un contrôle nécessaire ex post, à travers un examen périodique, dans la même enceinte, du rapport spécifique annuel de la Commission européenne. Cette initiative (31) a cependant connu des difficultés de réalisation, mais elle mérite d'être approfondie.

L'incidence substantielle de ce tissu de relations qui est en train de se développer entre les divers Parlements des Etats membres, entre ceux-ci et le Parlement européen et entre l'ensemble de tous ces interlocuteurs et les Parlements des pays candidats à l'adhésion apparaît donc particulièrement significative. L'ensemble de ces rapports se répercute positivement, en effet, sur la capacité des Assemblées de mener une action efficace d'orientation et de contrôle sur leurs Exécutifs respectifs.

Bien qu'il ne soit pas possibile de les ramener à la procédure de révision des Traités, ces initiatives contribuent toutefois à configurer ce qu'on pourrait appeler la " Constitution matérielle de l'Union ".

Un vif débat est en cours dans tous nos pays, à propos de l'avenir de l'Union européenne, sur le constitutionnalisme, le fédéralisme, l'intégration et la subsidiarité ; autant de notions différentes, pourtant complémentaires, qui touchent la sensibilité de tous les Parlements. Au-delà des formules, si l'on considère les aspects concrets, alors les distances, bien que persistentes, pourraient apparaître moins dramatiques : les pays qui sont disposés à parler ouvertement de fédéralisme sont probablement moins nombreux que ceux qui sont disposés à participer à la monnaie unique, laquelle constitue cependant un facteur fondamental d'intégration politique et économique. Au cours de son histoire, la construction européenne s'est indubitablement enrichie aussi bien de la contribution apportée par les partisans de l'approche pragmatique que de l'apport donné par les concepteurs de l'Europe visionnaire. L'une a permis de construire des fondations de plus en plus solides, l'autre a donné l'impulsion, malgré des hauts et des bas, à des élans périodiques sans lesquels la construction non seulement se serait arrêtée mais aurait pu régresser.

Le besoin d'approfondir le débat sur les objectifs communs s'accompagne donc de la conscience de la possibilité d'arriver à des ententes sur des solutions concrètes, malgré les distinctions qui demeurent sur quelques formules de principe. Prenons, par exemple, la remise en ordre des Traités. Comme l'a bien montré l'Institut européen de Florence, il s'agit là d'un processus qui peut s'accomplir même sans une révision formelle des dispositions qui s'y rattachent. Or il est évident que la nécessité de procéder à cette remise en ordre rencontre une large approbation, sauf que certains voudraient saisir l'occasion offerte par le Conseil de Nice, tandis que d'autres préféreraient viser cet objectif après la clôture de la négotiation en cours.

Dans cette perspective - et l'enceinte d'aujourd'hui me semble l'une des plus appropriées - il convient de sélectionner des instruments aptes à collecter des informations systématiques sur les prises de position des divers Parlements et sur les évaluations et réflexions qui les ont précédées. Nous sommes convaincus en effet qu'une connaissance plus approfondie des positions, des préoccupations et des priorités des uns et des autres pourrait permettre un développement plus souple du parcours commun. Et nous sommes conscients que la multiplication de relations horizontales et verticales entre les Parlements et entre ceux-ci et les autres institutions des Etats membres et de l'Union contribue à forger ce qui a déjà été qualifié de " Constitution matérielle de l'Europe ". Et cette Constitution fait partie intégrante de la conscience largement répandue qu'ont tous les Européens d'avoir en commun une histoire, une culture, des valeurs, des intérêts et, en définitive, la même destinée.

1.Question dont l'actualité est prouvée par les décisions prises concernant la composition de l'organisme appelé à la rédaction de la Charte des droits fondamentaux.
2.Ce protocole prévoit aussi en particulier un délai minimum entre la présentation de projets d'actes législatifs par la Commission et leur examen par le Conseil, dans le but précisément de permettre aux assemblées parlementaires nationales d'exprimer leur orientation en conformité avec leurs systèmes respectifs.
3.Sur le thème "la situation actuelle de l'Union européenne et les tâches qui en découlent pour les Parlements nationaux en matière de démocratisation et de réformes institutionnelles". Le débat qui s'est développé en cette occasion a été extrêmement significatif, si bien que certains participants, dont le Vice-Président du Sénat italien, M.Rognoni, et le rapporteur lui-même, M. Langendries, ont proposé d'instituer un groupe de travail expressément consacré à ce sujet et au rôle de la coopération parlementaire.
4.Ce qu'on appelle left overs, extension du vote à la majorité, nouvelle pondération du vote sur le Conseil et redéfinition de la composition de la Commission européenne.
5.Nous rappelons les initiatives lancées, dans un premier temps par l'ancien Président de la Commission européenne, M. Delors, par l'ancien Président de la République française, M. Giscard D'Estaing et par l'ancien Chancellier allemand, M. Schmid et, ensuite, le discours du Ministre allemand des affaires étrangères, M. Fischer, du Président de la République française, M. Chirac, et du Président de la République italienne, M. Ciampi. Dans certaines de ces prises de position, on a envisagé des modèles fondés sur un système bicaméral incluant également des représentants des Parlements nationaux. Cette proposition a été entre autres soutenue par des répresentants du Parlement du Portugal, pays qui avait eu un rôle crucial, au cours de sa Présidence, pour mettre en route la Conférence gouvernementale, définir son ordre du jour et développer ses travaux.
6.Comme cela est indiqué dans la résolution adoptée par le Folketing danois le 23 février dernier.
7. Dont l'Italie, alignée la-dessus sur le Président de la Commission européenne et le Parlement européen.
8.Il convient de signaler à ce sujet le débat, déjà mentionné, qui a eu lieu au Sénat italien les 13 et 18 juillet 2000, sur la réforme des institutions communautaires.
9.Institution visant à permettre à un groupe restreint de pays d'accroître l'intégration dans des domaines déterminés, à défaut d'un accord unanime entre tous les Etats membres.
10.Pour ce qui concerne notamment les organismes juridictionnels de l'Union, différentes propositions concernant l'allégement des procédures litigieuses, la simplification des procédures de révision des règlements respectifs et une éventuelle révision des compétences respectives de la Cour et du Tribunal de première instance ont été également avancées.
11.Les thèmes les plus controversés comprennent, parmi d'autres, la fiscalité. D'après divers Parlements (dont le suédois, le finlandais, - sauf pour les impôts visant des objectifs environnementaux, pour lesquels celui-ci se déclare disponible au vote à la majorité -, le français, le luxembourgeois et le néerlandais, ainsi que la House of Commons britannique), la fiscalitè ne peut faire l'objet de votes à la majorité qualifiée. En d'autres cas il faut relever des réserves de la part de certains Parlements sur d'autres matières telles que: union économique et monétaire (Assemblée nationale française), dérogations au droit communautaire et au marché intérieur (Assemblée nationale française, Italie), environnement (Autriche), politiques régionales (Autriche) et de cohésion et de sécurité sociale (Finlande, Luxembourg, Pays-Bas et House of Commons britannique), conditions de travail de citoyens de pays tiers (Luxembourg), l'énergie (Autriche, Finlande, France), droit de circulation et de séjour (Luxembourg), régime des professions (Luxembourg), la coopération entre les administrations nationales et communautaires en matière de visas, d'asile et d'immigration (Finlande, Sénat français et House of Commons britannique), la réglementation des aides d'Etat (Finlande), le droit d'auteur (Finlande), la coopération dans les affaires pénales et de police (Finlande, France, Luxembourg et House of Commons britannique), la PESC, politique étrangère et de sécurité commune, (Finlande, France et House of Commons britannique), les relations extérieures (France et House of Commons britannique), les nominations (Sénat français, Luxembourg), les sanctions pour violation de droits fondamentaux (Sénat français), les élections et le statut des députés européens (Luxembourg) et le choix du siège des institutions communautaires (Luxembourg). Il convient de remarquer à cet effet les contributions parvenues à la Conférence et les réponses au questionnaire déjà mentionné de la COSAC. Cependant, de l'avis de certaines Assemblées, telles que la House of Lords, des progrès significatifs sur l'extension du vote à la majorité qualifiée ne seront possibles que pour un nombre circonscrit de cas non controversés et d'importance essentiellement technique (il convient de rappeller à ce propos le rapport sur la CIG du 18 juillet 2000).
12.Comme l'a mis en évidence le Parlement portugais dans sa réponse au questionnaire susmentionné de la COSAC. Selon le Sénat français, en particulier, la nouvelle pondération des voix au Conseil est une condition pour l'extension du vote à la majorité qualifiée.
13.Soutenu par la House of Lords.
14.Comme on peut le déduire clairement du document de la Commission des affaires européennes du Parlement irlandais adopté le 28 octobre 1998.
15.Comme cela a été également proposé par la House of Lords britannique dans le rapport sur la CIG publié le 18 juillet dernier.
16.Solution préférée par la House of Lords, si l'accord pour limiter le nombre des Commissaires à moins de vingt n'était pas possible.
17.Il y a d'autres aspects ayant trait au fonctionnement et à l'organisation de la Commission qui font l'objet d'une réflexion mais, comme c'est le cas de la proposition de formaliser dans les traités l'engagement pris par les commissaires actuels de démissioner en cas de rupture du rapport de confiance avec le Président, ces aspects rencontrent parfois des résistances plus significatives.
18. Comme c'est le cas de l'absorption lente et complexe des accords de Schengen dans le cadre de l'Union ainsi que de la persistante impossibilité d'intégrer définitivement l'UEO dans les traités.
19.Il convient de rappeler, à ce sujet, le débat su Sénat italien sur la réforme des institutions communautaires du 13 et du 18 juillet; le discours du Président Chirac à Berlin du 27 juin 2000; les propositions avancées par MM.Delors, Giscard et Schmidt dans "Agence Europe" des 20-21 mars, du 29 mars, du 13 et du 26 avril 2000.
20.Certaines assemblées, comme la House of Lords, relèvent en outre l'inutilité de modifier les dispositions en vigueur sur la flexibilité car elles n'ont jamais été appliquées jusque-là. En outre, le Parlement portugais, tout en constatant la potentialitè offerte par la coopération renforcée dans le deuxième et le troisième pilier, a souligné les risques que son application dans ce domaine pourraient représenter pour la cohésion du marché unique. Ce risque a été également mis en exergue par la House of Commons du Royaume-Uni. Il convient de rappeler à cet égard les réponses au questionnaire de la COSAC déjà mentionné.
21.Dont le droit des travailleurs à l'information et à la consultation dans le cadre de l'entreprise, le droit de négotiation et d'action collective, y compris le droit de grève, et le droit à la sécurité et à l'assistance sociale. Des principes tels que l'interdiction de la traite des êtres humains ou la liberté de pensée, de conscience, de religion et la libertée d'association, qui ont déjà fait l'objet depuis des décennies d'instruments internationaux spécifiques de protection.
22. Des principes tels que l'interdiction de la traite des êtres humains ou la liberté de pensée, de conscience, de religion et la libertée d'association, qui ont déjà fait l'objet depuis des décennies d'instruments internationaux spécifiques de protection.
23. Concernant en particulier ces dernier droits, les garanties comprennent: à l'article 3, sur le droit à l'intégrité de la personne, l'obligation de respecter en médecine et en biologie les principes de l'accord libre et éclairé, l'interdiction des pratiques eugénétiques, l'interdiction de faire du corps humain et de ses parties une source de gains et l'interdiction du clonage reproductif des êtres humains; à l'article 8, sur la protection des données de caractère général, l'obligation d'application du principe de loyauté, l'accord de la personne concernée, le droit d'accéder aux données collectées sur sa personne et d'en obtenir la rectification.
24. Sur les questions exposées ci-dessus les Parlements nationaux ont exprimé des appréciations à travers les réponses que leurs organes spécialisés dans les affaires communautaires ont données à un questionnaire de la COSAC. Les Parlements de Belgique, de France, d'Italie, du Luxembourg et du Portugal soutiennent le caractère contraignant de la Charte. Le Bundesrat allemand s'est exprimé en faveur de l'absorption de la Charte des droits fondamentaux dans le droit communautaire (contribution du Bundesrat à la Conférence des Présidents); plus en particulier, le Bundesrat estime que la Charte doit avoir un caractère contraignant et qu'en un deuxième temps elle pourra être incorporée dans les traités à travers les procédures prévues par l'article 48 du Traité sur l'Union européenne. Par contre le Danemark (contribution du Parlement danois à la Conférence des Présidents), la Finlande, les Pys-Bas, la Suède et le Royaume-Uni sont favorables à une valeur de déclaration. S'agissant du rapport entre la Charte et la Convention européenne, la plupart des Parlements nationaux estiment que la Charte doit garantir un niveau de protection non inférieur au niveau minimum donné par la Convention européenne et avec lequel il faut trouver une coordination, tout en souhaitant un niveau plus élevé. La Suède et le Royaume-Uni redoutent dans ce rapport un risque de complication et de confusion. Pour ce qui est en particulier du Royaume-Uni, la House of Lords, après avoir souligné l'insuffisance d'une simple déclaration politique pour garantir la sauvegarde des droits de l'homme dans le cadre de l'Union européenne, a exprimé à ce effet sa préférence pour une adhésion formelle de l'Union à la Convention européenne des droits de l'homme. A ce sujet la Présidence portugaise, dans son rapport présenté au Conseil européen de Feira, a cependant mis en évidence les difficultés qu'il y a à atteindre un consensus sur l'insertion dans l'ordre du jour de la CIG de la question de l'adhésion de l'Union européenne au Conseil de l'Europe. Pour les Pays-Bas il n'y aura pas de problèmes si l'Union européenne accepte que la Cour européenne des droits de l'homme de Strasbourg devienne la plus haute autorité dans la protection des droits de l'homme. Pour la Suède il importe d'assurer que la Cour de Strasbourg deviendra en la matière la prima inter pares en Europe.
25.Lors d'une visite à Leipzig le 6 juillet dernier.
26.L'idée d'un ordre institutionnel basé sur une Charte constitutionnelle a été avancée, bien qu'avec des nuances différentes, tant par le Président Chirac que par le Ministre Fisher et la proposition de procéder à une remise en ordre des traités incluant una partie de nature constitutionnelle basée sur la reconnaissance des droits fondamentaux et le fonctionnement des institutions de l'Union a été formalisée aussi bien dans les prises de position du Parlement européen que dans celles du Parlement italien. (Il convient de rappeler à ce propos la résolution du Comité pour les affaires des Communautés européennes du Sénat italien du 15 mars 2000, la résolution adoptée conjointement par les Commissions III et XIV de la Chambre des députés italienne le 10 février 2000 et les résolutions Migone et autres et Salvato et autres adoptées par le Sénat italien le 18 juillet 2000). A ce sujet, en particulier, le Parlement européen a proposé de parvenir à une nouvelle rédaction des différents Traités en matière institutionnelle en procédant à leur consolidation dans un texte unique divisé en deux parties, l'une - concernant les droits fondamentaux et le cadre institutionnel - de nature constitutionnelle et l'autre, concernant les politiques sectorielles, soumise à des procédures de révision simplifiées.
27. A l'occasion de l'audition des représentants des pays candidats devant la Convention, par ailleurs, certains d'entre eux, tout en partageant unanimement la perspective de l'adoption d'une Charte des droits, ont exprimé leurs préoccupations au sujet des conditionnements que l'attribution d'une valeur contraignante à la Charte pourrait comporter pour leur adhésion.
28. Comme l'a fort à propos fait remarquer le représentant de la Présidence portugaise en avril dernier, M.Da Costa, dans sa déclaration rapportée dans l'Agence Europe du 13 avril 2000.
29.Le Parlement danois, par exemple, préfère pour la révision des Traités la procédure intergouvernementale actuelle et ne souhaite pas à ce propos une influence accrue du Parlement européen.
30.Par des réunions qui tendent à prendre un caractère périodique d'organismes comme les Commissions du travail, de l'environnement, des affaires économiques et monétaires, des affaires étrangères, des transports.
31. Soutenue à la Conférence, déjà mentionnée, des Présidents des Parlements de Vienne par le Président Langendries et réaffirmée par le Président Violante devant la Conférence des Présidents.